
Ils venaient en voiture de course. Ils repartaient de même. Une autre époque, un autre style. Et cette année encore, certains ont tenu à raviver l’esprit chevaleresque des pionniers du Mans.
L'
e Mans Classic 2025 vient de refermer les grilles du circuit sarthois. Trois jours et trois nuits de passion, d’huile chaude et de moteurs anciens. Un moment hors du temps.
Mais le plus fascinant n’est peut-être pas sur la piste. Il est sur la route. Car à l’époque, certains pilotes rentraient chez eux… avec la voiture qui venait de courir les 24 Heures du Mans.

Les Bentley Boys, gentlemen de la route
Les premiers à faire de ce retour une signature furent les Bentley Boys. Gentlemen drivers britanniques des années 1920 : Woolf Barnato, Tim Birkin, Glen Kidston et Benjy Benjafield – ce dernier était médecin et remporta les 24 Heures du Mans en 1927. Après la course, ils quittaient la Sarthe à bord de leurs Bentley Speed Six ou 3 Litre pour rejoindre Londres, direction Morton’s, le club privé de Benjafield au 28 Berkeley Square. On garait les voitures devant la porte, les verres de gin tonic s’enchaînaient. Un retour d’épopée, célébré à la hauteur de la démesure britannique.

Le garage du village, les mécanos en bleu
Dans les années 50-60, l’esprit perdure. L’Hôtel de France à La Chartre-sur-le-Loir accueille alors les grandes écuries (Aston Martin, Alpine, Lotus, Porsche). Les sport-prototypes sont préparés dans les garages du village, et chaque matin, les pilotes prennent la route – sans plaque, sans feux, parfois sans essuie-glaces – pour rejoindre le circuit. Un ingénieur se souvient d’un trajet de nuit assis à côté de Bruce McLaren, filant à 270 km/h vers la ligne droite des Hunaudières.

Cent ans plus tard, même esprit
En 2024, pour le centenaire de la victoire Bentley de 1924, la 3 Litre Sport de John Duff est revenue au Mans… par la route. Même voiture. Même panache. Comme un clin d’œil à ceux qui faisaient rimer compétition et élégance.

Ma propre route
Dimanche, en fin d’après-midi, je pensais à tout ça. Je quittais Le Mans sous la pluie, au volant de ma MGB GT de 1972. Fatigué mais heureux. Pas de chrono, pas de podium, juste cette pensée obsédante : comment faisaient-ils, eux, après 24 heures de course, pour repartir par la route ?